Il était une fois une petite fille,

Il était une fois une petite fille, qui ne se demandait pas ce qu’elle deviendrait car elle n’en avait rien à faire. Pourtant elle faisait, et dévidait sa vie sur un vieux rouet.

Petit à petit, en ne lâchant pas le monde de ses yeux verts.

Et petit petit était son monde.

Quoiqu’il prît le large assez facilement et sans crier gare par les champs et les bois, mais il suffisait de bien le tenir en lisière pour qu’il n’échappât pas complètement au regard.

Le monde avait la taille d’une cour d’école, d’une entrée de mairie et d’une rue en pente qui dévalait jusqu’à une fontaine…

Un monde plein de chemins, de sentiers et de bois et de ronces et de lilas aux branches de cerisiers, de masures dérisoires, de barrières qui s’affaissent, de murets où court peut-être encore du lierre, va savoir !

Et va savoir, maintenant qu’il a grandi, pourquoi elle s’est mise à écrire…

GUADELOUPE KARUKERA - Antan longtemps


 



Seul le bœuf porte un collier de fer en haut de la vieille distillerie,
 








Mais dans les ruines de la maison-case, aux arbres poussés pendent encore des chaînes, lianes hypocrites,
 



 




Et les racines, au creux des forêts denses, lacèrent toujours les chemins, 





 
Entravent la roche marronne qui s’est évadée du volcan,

 



 




Préparent le long des troncs des liens de bois pour les fuyards.





La canopée est-elle l’inéluctable toit d’une cellule verte et luisante aux barreaux de pluie ?







La mangrove, un piège ?

Prêt à refermer sur des jarrets nus l’arceau ligneux de ses mâchoires,
Prêt à marquer l’épaule de la feuille d’un palétuvier, aussi rouge que sur son fer incandescent  la fleur de lys, 
Trifide aigrette venue d’un pays lointain aux climats infiniment éloignés,
Qui disait en son temps de traite négrière :
Par la grâce d’un dieu absent,
Article 44
Déclarons les esclaves être meubles






Et la palme morte sur la trace, le suaire fané d’un parmi d’autres qui n’a pas pu se perdre dans l’oubli des Grands Fonds ?








Non !

Sous les nuages marchands de charbon, plus noirs que le Code Noir, enfin chassés,
Le bleu d’une libellule est la couleur définitive de la liberté,
Par deux fois abolie,
Par deux fois retrouvée…



LSB 2/05/13